3 raisons pour lesquelles j’ai suivi les recommandations de la ministre de la justice pour l’annulation de l’amendement Touraine.
Le sujet est plus sérieux que le camp des méchants contre celui des gentils. Chacun a pu être réceptif à bien des arguments. Ceux de la ministre me semblent solides pour peu qu’on les lise :
Extrait de l’intervention de Nicole Belloubet :
– Les dispositions adoptées ne règlent qu’une partie des situations, ce système est donc « injuste » pour les enfants dont la filiation n’a pas été établie par un jugement, soit parce que l’état n’a rien prévu, soit parce que l’État qui accepte la GPA a prévu un autre système d’attribution d’affiliation que celui d’un jugement. Le dispositif tel qu’il est proposé n’est donc pas complet, il introduit une différence entre les enfants.
– Ces dispositions ouvrent une voie de détournement de la procédure d’adoption : dans l’amendement du député Touraine : « la régularité internationale des jugements » telle est précisément ma préoccupation. Nous avons signé des accords internationaux en matière d’adoption dont le principal objectif est « la protection des enfants » : la convention de La Haye 1993 que nous avons ratifiée, qui permet d’éviter les trafics d’enfants. Ces conventions internationales garantissent l’effectivité des contrôles et des vérifications qui sont opérés par les autorités centrales du pays de l’adoptant et de l’adopté. Ce qui fonde la nécessité d’un tel contrôle, celui du juge français dans la procédure d’adoption, c’est l’intérêt de l’enfant. Cela permet au juge de contrôler tant la rupture du lien entre l’enfant et la mère biologique que l’établissement du lien avec la famille qui veut l’accueillir. L’amendement Touraine interdit tout type de contrôle autre qu’un contrôle simplement formel sur le jugement étranger. Du coup risque de jugements de complaisance qui seraient directement intégrés dans le droit français.
– Ces dispositions introduisent une contradiction avec nos principes éthiques et judiciaires qui interdisent la GPA. Les dispositions adoptées autorisent la reconnaissance de plein droit d’une filiation d’un enfant né de GPA dès lors que cette filiation aurait fait l’objet d’un encadrement juridique supposé être acceptable c’est-à-dire un encadrement garanti par un jugement. On voit là le glissement qui pourrait s’opérer et qui nous placerait en contradiction avec nos principes éthiques. Au fond en commençant à distinguer dans la loi entre une GPA qui serait considérée comme acceptable parce qu’elle découlerait d’un jugement et une autre qui ne découlant pas d’un jugement le serait moins, on voit là les risques qui ouvrent une brèche dans la prohibition de la GPA que nous avons.